Projet de loi contre la fraude fiscale : le gouvernement rate sa cible

Comme annoncé depuis plusieurs semaines, le gouvernement a présenté ce matin le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale. Malheureusement, pour Oxfam les mesures proposées ratent leur cible et ne permettront pas de s’attaquer au cœur du problème de la fraude fiscale.

Selon l’ONG, le renforcement des sanctions et la création d’une police fiscale resteront dérisoires tant que sera maintenu le « verrou de Bercy », monopole du ministère des Finances en matière de poursuites judiciaires pour fraude fiscale, qui limite considérablement les poursuites judiciaires à l’encontre des fraudeurs.

Pour Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam France : « Il est temps de mettre un terme à cette exception française qui institue une justice à deux vitesses ainsi qu’une forme d’impunité pour les délinquants en col blanc. Le gouvernement peut donc renforcer sa police fiscale et son arsenal de sanctions administratives, tant que les fraudeurs ne seront pas inquiétés par la justice, il y a peu de chances de parvenir à dissuader leurs pratiques de fraude fiscale. Même chose pour les intermédiaires – cabinets de conseils, experts, avocats fiscalistes – qui sont eux aussi protégés par le verrou de Bercy.»

Pour rappel sur 16 000 infractions graves, seulement un millier de dossiers est transmis à la justice, lesquels n’aboutissent qu’à quelques condamnations à de la prison ferme. Pourtant la loi prévoit jusque 8 ansde prison pour délit de fraude fiscale.

Par ailleurs, le dispositif de « plaider coupable » est très inquiétant puisqu’il tend à renforcer une forme de justice d’exception en permettant l’abandon des poursuites pénales contre les entreprises ou les particuliers accusés de fraude en échange de leur aveu de culpabilité.

Pour Manon Aubry : « Ceci est un très mauvais signe envoyé aux fraudeurs qui seraient désormais à même de « négocier » leur peine afin de ne pas être poursuivis en justice. Impensable pour n’importe quel délit de droit commun. »

L’autre déception importante concerne la liste des paradis fiscaux qui se contente de transposer la liste européenne qui ne comporte que 9 pays et aucun paradis fiscal notoire comme les îles Caïmans, la Suisse, l’Irlande ou le Luxembourg.

Pour Manon Aubry : « Cette liste française de paradis fiscaux manque totalement d’ambition et de courage politique alors que la France prétend endosser un rôle de leader européen dans la lutte contre l’évasion fiscale. Le gouvernement doit mettre fin à ce double-jeu s’il veut être crédible auprès de ses partenaires politiques et des citoyens qui sont exaspérés par ces pratiques dont nous payons tous le prix.»

« En l’état, ce projet de loi passe à côté de l’essentiel en renonçant à deux mesures majeures attendues par les organisations de la société civile : la suppression du verrou de Bercy et une liste claire et ambitieuse des paradis fiscaux, incluant notamment des pays européens. Nous comptons désormais sur les parlementaires pour relever le niveau d’ambition du projet de loi qui manque pour le moment sa cible.»

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Contact presse : Pauline Leclère 07 69 17 49 63pleclere@oxfamfrance.org

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