Un an après son arrivée au pouvoir, l’action d’Emmanuel Macron a été marquée par des belles paroles mais des actes insuffisants pour le climat et la solidarité internationale, ainsi que par de graves reculs sur la fiscalité des plus riches et de la finance qui vont accroître les inégalités.

Des choix fiscaux marqués qui vont aggraver les inégalités

« Alors qu’en France, les 10 % les plus riches détiennent plus de la moitié des richesses quand les 50 % les plus pauvres ne se partagent que 5 % du gâteau, l’action du Gouvernement est à contre-sens complet de la lutte contre les inégalités. En multipliant les cadeaux fiscaux aux plus fortunés et aux grandes entreprises comme la suppression de l’ISF ou la baisse du taux d’imposition sur les sociétés, le Gouvernement a fait un choix clair et s’est attaqué à la fonction même de redistribution des richesses jouée par l’impôt. Du côté de la lutte contre l’évasion fiscale, les mesures annoncées jusque-là par le Gouvernement ratent leur cible en ne s’attaquant pas au verrou de Bercy ou à la liste française de paradis fiscaux. Pire encore, la récente annonce d’Emmanuel Macron de supprimer l’exit tax témoigne du laxisme envers les fraudeurs fiscaux. Le Gouvernement et les députés doivent rectifier le tir à l’occasion de l’examen du projet de loi fraude fiscale et de la loi Pacte qui pose le nécessaire débat du partage des richesses au sein des entreprises. »

Sur le climat, joindre le geste au niveau national aux belles paroles au niveau international

« Depuis l’annonce du retrait des Etats-Unis de l’Accord de Paris en juin 2017, Emmanuel Macron s’est posé en chef de file de la lutte contre le changement climatique sur la scène internationale. Si les nombreux discours forts sur l’injustice du phénomène, qui touche de manière disproportionnée les plus pauvres, sont les bienvenus, ils n’ont cependant pas été suivis d’annonces financières à la hauteur des besoins croissants des pays en développement. En outre, alors qu’Emmanuel Macron s’était engagé pendant sa campagne à maintenir la loi de transition énergétique votée en 2015, il est revenu sur plusieurs aspects clé de celle-ci, et a clairement manqué d’ambition pour le développement des énergies renouvelables en France – envoyant un signal désastreux aux autres pays. »

Pour la solidarité internationale, au-delà des annonces et de premiers gestes timides, le compte n’y est toujours pas

« Depuis son élection, Emmanuel Macron s’est engagé à placer les services essentiels, l’égalité femmes-hommes, l’adaptation au changement climatique, et l’aide humanitaire au cœur des priorités de la politique française de développement. Il s’est également engagé à multiplier par dix la contribution française au Partenariat mondial pour l’éducation. En outre, le Gouvernement a enfin publié une trajectoire budgétaire pour concrétiser l’engagement d’Emmanuel Macron d’allouer 0,55 % du revenu national à l’aide au développement d’ici 2022. Mais, alors que cet engagement présidentiel est déjà en deçà de la norme internationale de 0,7 %, la France se contente de promettre d’augmenter son aide à partir de 2020. Pourtant l’urgence est là et les 800 millions de personnes vivant encore dans l’extrême pauvreté ne peuvent pas attendre. »

Reculade sur la taxe sur les transactions financières en France et en Europe

« Un des premiers actes posés par le nouveau gouvernement sur la scène européenne a été de torpiller le projet de compromis qui avait été trouvé pour la mise en place d’une taxe sur les transactions financières européennes au sein de dix pays européens pilotes, et qu’il ne restait plus qu’à signer. Emmanuel Macron lui-même avait annoncé aux ONG dès juin 2017 que ce dossier serait conclu avant l’été dernier, puis avait fait volte-face, en repoussant aux calendes grecques la conclusion d’un accord européen. En outre, en choisissant de revenir sur l’élargissement de la taxe sur les transactions financières françaises qui avait été voté lors de la précédente législature, Emmanuel Macron s’est assis sur 2 à 4 milliards d’euros de recettes budgétaires supplémentaires pour la solidarité internationale et le climat. Clairement, entre la justice sociale et climatique d’une part, et la défense du lobby des banquiers, Emmanuel Macron a fait son choix ! Il faut d’urgence relancer la négociation européenne sur ce dossier sur une base ambitieuse, en partenariat avec le nouveau gouvernement allemand, et dès cette année choisir d’affecter 100 % des recettes de la TTF française au climat et à la solidarité internationale. »

Un pas en avant pour la sécurité alimentaire et la cohérence des politiques

« La décision du retrait de la France de la Nouvelle Alliance du G8 pour la Sécurité Alimentaire et la Nutrition (NASAN), qui privilégie les intérêts des multinationales de l’agrobusiness au détriment du soutien à l’agriculture paysanne, a été bienvenue. Au-delà de la NASAN, la France doit tirer les leçons de cet échec et ne plus s’engager dans des initiatives ou projets d’investissement comportant les mêmes failles. L’exclusion des organisations paysannes de la gouvernance, l’absence de cadre de redevabilité et la priorisation des multinationales au détriment des acteurs locaux ne sont pas les remèdes de la lutte contre la faim. Ainsi, alors que la faim dans le monde augmente, la sortie de la NASAN doit être le signal d’une réorientation réelle des soutiens mobilisés. En cohérence avec cette décision, les 400 millions d’euros annuels que la France consacre à la sécurité alimentaire dans les pays du Sud doivent être pleinement consacrés au développement de l’agro-écologie paysanne. Malheureusement, les Etats Généraux de l’Alimentation ont largement fait l’impasse sur la compatibilité de notre modèle agricole avec la nécessaire réduction de la faim dans le monde, alors que celle-ci est repartie à la hausse en 2017 pour la première fois depuis plus de dix ans. »

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Caroline Prak
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